Le groupe pétrolier Total va lancer un site expérimental de captage et stockage de CO2, une technologie prometteuse pour la lutte contre le changement climatique mais encore incertaine.
Le projet consiste à extraire le dioxyde de carbone des fumées émises par une chaudière de l'usine de Lacq (sud-ouest de la France) pour le réinjecter à 4.500 mètres sous terre dans un ancien gisement de gaz naturel situé à Rousse, près de Pau.
Enterrer le CO2, principal gaz à effet de serre, permet d'éviter qu'il ne se répande dans l'atmosphère en contribuant au réchauffement de la planète.
Il s'agit de "la première chaîne intégrée de captage de CO2 par oxycombustion associée à un stockage dans un ancien gisement terrestre", selon Christophe de Margerie, directeur général exploration-production de Total.
Pour le pétrolier, ce procédé qui consiste à remettre le CO2 dans un gisement vidé de son gaz naturel, "c'est un retour à l'envoyeur", commente Jean-Michel Gires, directeur du développement durable et de l'environnement.
La phase d'études d'ingéniérie est lancée, les injections de CO2 commenceront en novembre 2008 pour atteindre jusqu'à 150.000 tonnes en deux ans. "On va regarder pendant deux ans comment ça se passe. Il faut démontrer que tout cela tient la route", indique à l'AFP M. Gires.
Le groupe, qui se prépare à répondre à d'éventuelles inquiétudes de la population locale, assure que la structure géologique du gisement de Rousse présente "de solides garanties de pérennité".
Certains écologistes craignent que des bulles de gaz ne remontent à la surface par des fissures.
Différentes expérimentations de captage et stockage du CO2 sont menées dans le monde. En Mer du Nord, le groupe pétrolier norvégien Statoil injecte du CO2 dans un aquifère salin à 1.000 m de profondeur sous le plancher océanique. En Pologne, le projet européen Recopol vise à stocker du CO2 dans une veine de charbon. Au Danemark, le projet Castor, piloté par l'Institut français du pétrole (IFP) est un autre "piège à CO2".
D'importants progrès apparaissent nécessaires pour rendre la filière économiquement attractive.
Ces technologies sont encore trop chères: entre 60 et 100 euros la tonne de CO2 évitée, pour le projet de Total.
A titre de comparaison, sur le marché européen du carbone, où se négocient des quotas d'émissions, le cours de la tonne de CO2 s'est effondré et tourne actuellement autour de 1,50 euro contre environ 26 euros il y a un an. Une situation due au laxisme des premiers plans d'allocations de quotas aux Etats membres, selon les associations environnementalistes.
Total estime qu'il faudra attendre 2020 pour passer au stade des réalisations industrielles et commerciales.
Le jeu en vaut cependant la chandelle: pour alimenter leur croissance, des pays comme la Chine et l'Inde vont avoir recours massivement aux énergies fossiles, notamment le charbon, et risquent de devenir de très gros émetteurs de gaz à effet de serre.
L'économiste britannique, Nicholas Stern, a plaidé lundi à Sciences Po en faveur du développement rapide du captage et du stockage du carbone, soulignant qu'il serait impossible d'empêcher ces pays d'utiliser le charbon.
La Chine et l'Inde ne sont pas concernés par les restrictions du protocole de Kyoto (1997) sur les émissions de gaz à effet de serre, dont le première période d'application vient à échéance en 2012, car ils sont considérés comme des pays en développement.
Source : AFP