La Presse
La Conférence internationale sur la couche d'ozone s'est ouverte hier à Montréal et déjà, une issue positive se dessine. Sous la pression des États-Unis et du Canada, la Chine envisagerait une accélération des mesures visant à reconstituer la couche d'ozone.
Un tel geste aurait un impact environnemental considérable: non seulement il permettrait au fameux trou de la couche d'ozone de se colmater plus rapidement, il réduirait également les gaz à effet de serre de la planète de 3,5%, si l'on se fie aux évaluations de l'ONU.
Selon les informations obtenues par La Presse hier, l'état des pourparlers que mènent les pays industrialisés avec la Chine laisse croire que cette dernière pourrait finalement accepter d'abandonner l'utilisation des HCFC (hydrochlorofluorocarbones - puissants gaz à effet de serre) 10 ans plus tôt que prévu, soit en 2030, en échange d'une aide financière accrue.
Cette question est au coeur des débats menant à la clôture des discussions, prévues pour vendredi. Les grandes lignes de la déclaration finale, d'ailleurs, sont déjà écrites et font état de l'importance de "maintenir" l'assistance financière aux pays en développement, comme la Chine.
La délégation américaine, qui mène le bras de fer contre le géant asiatique, confirme être en négociations sur l'ampleur du financement qui sera accordé à la Chine. «Pour nous, la question principale de cette conférence est celle-ci: réussirons-nous à nous entendre avec la Chine sur les montants nécessaires pour accélérer la transition? Le fond existe déjà, nous sommes prêts à y contribuer davantage, mais il n'est pas question de signer un chèque en blanc», a indiqué en entrevue Claudia McMurray, adjointe au secrétaire d'État pour les affaires environnementales et scientifiques internationales.
Le Canada, qui a dévoilé sa position sur la question ces derniers jours, appuie sans réserve la position américaine qui vise également à accélérer de 10 ans l'élimination des HCFC dans les pays industrialisés, soit en 2020. Une dizaine d'autres pays appuient cette position.
Hier, le ministre canadien de l'Environnement, John Baird, a qualifié à au moins quatre reprises la Chine de partenaire des négociations entourant le protocole de Montréal. Dans son discours d'ouverture de la conférence, il a même jugé «très encourageante» la participation de ce pays aux pourparlers.
Les HCFC sont une substance utilisée dans la climatisation et la réfrigération pour remplacer les CFC (chlorofluorocarbures), bannis selon le protocole de Montréal de 1987. Or le substitut a aussi ses tares: il est nocif pour la santé humaine, la couche d'ozone ainsi que le climat.
Au cours des dernières années, on estime que la production de cette substance, prisée pour son faible coût, a explosé de quelque 35% par année dans les pays en développement, principalement en Chine et en Inde.
Grâce au protocole, la couche d'ozone devrait retrouver vers 2050 ces niveaux d'avant 1980, soit avant l'apparition des trous. Toute accélération de l'élimination des substances honnies aurait un effet idoine sur le rétablissement de la couche d'ozone.
Super protocole!
Par ailleurs, le ministre John Baird a profité de différentes tribunes hier pour vanter les mérites du protocole, «le plus fructueux accord international jusqu'à maintenant». À son avis, le succès de ce traité prouve que les conservateurs sont très volontaires sur les questions environnementales, puisque c'est l'ancien premier ministre Brian Mulroney qui a piloté ce dossier il y a 20 ans.
M. Baird a ainsi soutenu que le Canada jouera un rôle de leader cette semaine auprès de la communauté internationale, «comme il le fait déjà dans la lutte contre les changements climatiques», a-t-il ajouté.
Cette prétention a fait bondir les environnementalistes qui affirment que le ministre «a tout faux». «M. Baird a mis plus d'énergies à discréditer Kyoto qu'à vouloir contribuer à la lutte contre les changements climatiques. Il ne peut donc nullement se réclamer de l'héritage de Brian Mulroney», a lancé Daniel Breton, de Québec Kyoto (anciennement coalition Québec Vert Kyoto).
De son côté, le directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), Achim Steiner, a lui aussi vanté les mérites du protocole, précisant que le nom de Montréal est aujourd'hui accolé dans le monde entier au traité environnemental le plus réussi de l'histoire.
«On estime que plus de 20 millions de cas de cancer de la peau auront été évités partout dans le monde d'ici 2060 grâce à ce traité», s'est-il réjoui.