''Une substance visqueuse et noire recouvre les plages et s’infiltre dans les baïnes dans le nord du Liban, neuf mois après la marée noire qui a suscité l’engagement de la communauté internationale à nettoyer cette section de la côte.
Le pétrole souille chaque plage au nord de Byblos, un ancien port de pêche aujourd’hui devenu l’une des principales attractions touristiques du Liban.
Israël a bombardé une raffinerie de pétrole située à Jiyyeh, au sud de Beyrouth, la capitale libanaise, pendant le conflit qui l’a opposé au bras armé du Hezbollah, parti politique libanais, en juillet dernier. Selon les estimations, le bombardement aurait provoqué le déversement de 10 000 à 15 000 tonnes de fuel dans la Méditerranée. Il s’agit du désastre écologique le plus grave jamais connu par le Liban, ont fait remarquer les écologistes.
« L’été arrive et le pétrole est en train de fondre », a déclaré Mohammed Sarji, président de l’Union des plongeurs libanais et directeur de l’opération de nettoyage, menée par l’ONG Bahr Loubnan (la mer du Liban) le long du littoral sud. « Les températures vont monter ; on pourrait se retrouver avec une rivière de pétrole se déversant dans la mer ».
Selon M. Sarji, le pétrole qui se liquéfie peut être rejeté sur le rivage ou bien former une pellicule à la surface de l’eau, ce qui menacerait la faune marine, et notamment les tortues ou les dauphins. « Ce n’est pas sain. Les gens ne devraient pas être en contact avec des dérivés de pétrole. Si les enfants qui nagent cet été en ont sur eux, ce sera horrible », a-t-il expliqué.
Les écologistes demandent également au gouvernement de retirer d’urgence au moins 3 000 tonnes de pétrole recueillies dans des sacs en plastique et des bidons le long de la côte. En été, ce pétrole se liquéfiera, expliquent-ils, et les contenants pourraient se fendre, contaminant ainsi la mer ou le sol.
Selon Ghada Mitri, représentante du ministère de l’Environnement, il incombe à ceux qui ont nettoyé les plages de se débarrasser de ces résidus de pétrole, avec l’aide du ministère si besoin.
Un nettoyage manuel minutieux
Bahr Loubnan a nettoyé la zone sous-marine qui longe la côte, de Byblos jusqu’au sud, y compris aux alentours de Jiyyeh. D’après M. Sarji, ce nettoyage manuel minutieux, qui a coûté jusqu’à présent 400 000 dollars américains à l’ONG, est presque achevé, sauf dans les endroits où la marée basse a mis au jour des nappes de pétrole.
USAID, l’agence américaine d’aide au développement, a accordé un contrat de cinq millions de dollars à la société américaine Seacor Environmental Services pour le nettoyage d’environ 60 km de côte, au nord de Byblos. Le ministère libanais de l’Environnement a supervisé les travaux.
En janvier, USAID avait déclaré, dans un communiqué de presse, que le nettoyage était terminé, mais le ministère libanais de l’Environnement a clarifié ces propos en précisant que la « première phase » était achevée – à savoir, l’extraction du pétrole flottant et du pétrole menaçant de se déverser de nouveau dans la mer.
« Le ministère de l’Environnement prévoit de lancer la deuxième phase – le nettoyage des plates-formes rocheuses, des surfaces des quais et des épaulements afin d’améliorer le niveau de propreté de certains sites le long de la côte, si le Liban reçoit les ressources nécessaires pour le faire – dès que la mer et le climat le permettront », a indiqué un communiqué du gouvernement.
A Byblos aujourd’hui, des amas de pétrole noircissent encore une plage publique et des bidons de pétrole, du sable et des galets visqueux s’amoncèlent près d’un tas de sable sale.
« Le nettoyage de cette zone a été mal fait et doit être achevé », a déclaré Fifi Kallab, directrice de l’ONG locale Byblos Ecologia. « Dans beaucoup d’endroits, les gens ne peuvent pas se baigner, ce qui va nuire au tourisme ».
Les Libanais comptent sur une saison touristique fructueuse cet été, pour compenser la saison dernière, qui avait connu un exode d’étrangers et d’habitants de la région en raison de la guerre.
Selon Sana Saliba, d’USAID, le ministère a demandé à l’agence d’attendre que l’étude côtière d’avril ait été achevée avant de lancer la phase suivante, qui serait sous-traitée à des sociétés libanaises. « L’idée, c’était aussi de laisser la nature faire une partie du travail, principalement sur les plages rocheuses », a-t-elle expliqué. « C’est la procédure de nettoyage normale ».
A en croire Raïf Nader, un habitant de la région qui supervise l’opération de nettoyage de Bahr Loubnan, de nombreuses plages de la région n’ont pas été touchées. « Ils n’ont rien fait [à ces endroits-là]. USAID nous a dit que Mère Nature nettoierait les roches. Pourquoi cela nous coûte-t-il cinq millions de dollars si c’est pour que le pétrole finisse de nouveau dans la mer ? ». ''
Source: NotrePlanète.info