Le désert gagne du terrain en Chine
Le désert progresse en Chine, notamment dans la province du Gansu (nord-ouest), où des paysans sont sommés de partir et où une vingtaine de villages vont être remplacés par des plants d'herbe censés faire barrage à l'avancée du sable.
Le même phénomène se produit dans une grande partie du pays: la surexploitation agricole entraîne une baisse des nappes phréatiques, ce qui favorise la désertification. Les autorités ont ordonné à des paysans du Gansu de quitter leurs terres sous trois ans et demi. Vingt villages de la région céderont la place à des herbes dans le but d'enrayer la progression des déserts de Tengger et Badain Jaran.
Le désert couvre aujourd'hui un tiers de la Chine et continue à s'étendre à cause de plusieurs facteurs: surpâturage, déforestation, extension des zones urbaines et sécheresses. Il a déjà englouti des milliers de villages le long de la célèbre Route de la soie et provoqué une hausse du nombre des tempêtes de sable. La poussière provenant de Chine se retrouve dans l'air de la Corée du Sud et a même été liée à des problèmes respiratoires... en Californie.
La Chine, qui possède moins de 7% des terres arables mondiales pour nourrir 1,3 milliard de personnes, soit plus de 20% de la population de la planète, tente de réagir. Mais le projet de déplacement forcé des paysans du Gansu est aussi un aveu implicite du gouvernement de ce que les efforts pour nourrir à tout prix le pays ont peut-être produit des effets pervers.
A l'époque du Grand Bond en avant de Mao Zedong, destiné à moderniser l'agriculture chinoise, le Gansu avait vu l'arrivée de l'irrigation afin de fertiliser des plaines arides de la région et d'augmenter la production agricole. Le réservoir local de Hongyashan fut ainsi construit dans les années 50 pour irriguer 400.000 hectares.
Mais au cours des deux dernières décennies, de nouveaux réservoirs ont été construits plus en amont de la rivière Shiyang, et le Hongyashan n'est plus aujourd'hui qu'à moitié rempli. Les agriculteurs ont aussi creusé des milliers de puits, ce qui a fait chuter le niveau des nappes phréatiques et provoqué une salinisation du sol.
Craignant que le désert n'atteigne la ville de Minqin, située 55 kilomètres plus loin, les autorités ont décidé de ramener la terre à son état naturel. Le village de M. Chen doit être délocalisé cette année sur un nouvel emplacement à 20 kilomètres de distance.
Dans toute la province, des plaines sans arbre balayées par le vent s'étendent à perte de vue. Les herbes hautes et le lac Qingtu ont été remplacés par le sable des déserts Tengger et Badain Jaran. De nombreuses localités ont été abandonnées.
La bataille contre les déserts se joue dans une grande partie de l'ouest de la Chine. La facture de la désertification s'élève à sept milliards de dollars (5,3 milliards d'euros) en pertes économiques annuelles, selon le "China Daily".
Au cours de la dernière décennie, les déserts chinois ont progressé en moyenne de 2.460 kilomètres carrés par an, selon Wang Tao, de l'Académie chinoise des sciences à Lanzhou. Les tempêtes de sable ont été presque multipliées par six depuis un demi-siècle, leur nombre s'élevant aujourd'hui à une vingtaine chaque année, précise-t-il. Et le réchauffement climatique ne fera qu'aggraver le problème.
Selon Lester Brown, de l'Institut de la politique de la Terre, la baisse de la production de céréales liée à la désertification en Chine pourrait à terme entraîner dans le pays une hausse des prix de la nourriture, ce qui est une source potentielle "d'instabilité politique".
Source : AP